Pierre-Louis Dupret en studio

Rencontre avec Pierre-Louis Dupret, faire de l’EMI une grande cause nationale

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) devient un élément essentiel au sein même de l’école mais aussi dans les rédactions. C’est dans ce contexte que la formation CCPI Éduquer aux médias portée par le CPNEF-AV et Presse, proposée par La Skol, se distingue comme une initiative pionnière. Fondée sur des principes d’éducation populaire, cette formation vise à développer une compréhension critique des médias tout en encourageant la créativité et l’expression personnelle à travers les médias radio et podcast.

Parmi les acteurs clés de ce programme se trouve Pierre-Louis Dupret, formateur principal à La Skol. Pierre-Louis, avec son parcours riche et diversifié dans le domaine de la radio et du podcast, apporte une expertise unique à la formation. Sa méthode, centrée sur l’apprentissage par la pratique et le jeu, rend l’expérience non seulement éducative mais également engageante et vivante.

Aujourd’hui, nous nous asseyons avec Pierre-Louis pour discuter de son parcours dans le domaine de la radio, de son approche pédagogique innovante, et de ses aspirations pour l’avenir de l’éducation aux médias. Il évoque aussi le livre ProxEMIté dont il est co-auteur. Rejoignez-nous pour découvrir les dessous de cette formation exceptionnelle et les perspectives d’un professionnel passionné qui contribue activement à façonner le paysage de l’éducation aux médias en France.

Prochaine formation : 22, 23 et 24 avril en présentiel, du 25 avril au 10 juin en distanciel et 11, 12 et 13 juin en présentiel.

1.  Pouvez-vous nous parler de votre parcours et comment vous êtes arrivé à La Skol ?

 J’ai rejoint Radio Laser en 2016 pour mener des ateliers d’EMI. Mes mentors, Sylvain Delfau et Germain Lechaussé, m’ont initié aux techniques radiophoniques et à l’animation d’ateliers pour les élèves. Depuis, nous avons étendu nos activités à un public plus large et développé une offre éducative complète en EMI. Nous intervenons en primaire, collège, lycée, facultés, centre de loisirs et espaces jeunes, instituts médicaux (IME, IEM, ITEP…), Foyers de vie (EHPAD, Hôpitaux)…

2. Quelle est votre approche pédagogique pour rendre les formations à la fois engageantes et instructives ?

J’adopte une approche basée sur l’éducation populaire, privilégiant l’apprentissage par la pratique et le jeu. Mon objectif est de valoriser les efforts des participants, même en cas d’échec, pour qu’ils comprennent et apprennent de leurs expériences. Je le fais quand je suis en atelier, mais je le fais aussi en tant que formateur. On le sait, l’humain même adulte apprend en jouant. Les recherches en neurosciences démontrent que l’apprentissage par le jeu active des zones clés du cerveau associées à la mémoire et à la compréhension ; par exemple, lorsqu’un élève participe à un jeu de rôle radiophonique, non seulement il assimile plus efficacement les techniques de communication, mais il renforce également sa capacité à retenir l’information et à la restituer de manière créative, illustrant ainsi le principe que l’engagement actif et ludique dans l’apprentissage facilite une meilleure assimilation et rétention des connaissances.

3. Il y a un projet qui vous tient à cœur.

Je pense surtout à des parcours, par exemple avec un jeune d’un IME qui grâce à la radio est sorti pour la première fois au cinéma pour voir un film et faire l’interview de Franck Dubosc.  Grace à cette sortie, il a pris confiance en lui et à commencer à sortir pour ses loisirs, il est même venu pendant un an à la radio pour y parler de manga. Quelle fierté.

Ou je pense au projet “Maria Salomea Skłodowska : Notre héritage, Notre Mémoire, Notre histoire“. Cette série de cinq épisodes est une réalisation dont je suis particulièrement fier. Elle représente une combinaison de recherche historique et de créativité radiophonique, visant à éduquer et inspirer nos auditeurs sur une figure historique importante Marie Curie. Et pour les jeunes c’est un moyen d’apprendre.

4. Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans votre rôle de formateur à la Skol ?

Ce qui me passionne le plus, c’est d’écouter, d’accompagner et de transmettre. Il n’y a rien de plus gratifiant que d’entendre un participant dire qu’il a réussi quelque chose qu’il pensait impossible. L’échange est tellement enrichissant, visiter d’autres radios, découvrir d’autres pratiques liées aux territoires ou à l’histoire de la radio. Il existe tellement d’approches différentes pour l’éducation aux médias, c’est génial. Ça montre qu’on ne pourra jamais mettre tout ça dans une boite et l’aseptiser.

5. Quels changements ou innovations souhaitez-vous voir ou apporter dans le monde de la radio et du podcast ?

Avec les prochaines promotions de la formation longue on va faire rentrer l’EMI dans le programme, ça c’était important pour nous. Et j’aimerais que les médias prennent conscience des dégâts de la désinformation. Ce n’est pas idéaliste, c’est juste qu’on construit les citoyens de demain.

6. Comment votre expérience personnelle a-t-elle influencé votre approche de la formation ?

Mon expérience m’a enseigné l’importance d’une approche active et interrogative dans l’éducation. J’ai été en échec scolaire car je n’entrais pas dans le moule de l’apprentissage classique. J’ai cru en moi, j’ai été entouré et j’ai trouvé mon truc en transmettant un savoir grâce à la radio. J’ai été particulièrement inspiré par un collègue formateur, dont la capacité à s’adapter et à transmettre des connaissances m’a motivé à devenir le formateur que je suis aujourd’hui.

7. Comment le guide “PROX EMI TE” influence-t-il la formation en EMI aujourd’hui ?

Ce guide est un outil précieux pour les praticiens en EMI. Il fournit des activités variées et des explications sur la pédagogie radiophonique, ce qui enrichit considérablement notre approche de l’éducation aux médias. J’ai adoré le faire, écrire un ouvrage c’est presque une revanche sur mes cours de Français. J’ai côtoyé des gens tellement intéressant. Ce n’est pas un ouvrage littéraire, ni universitaire, c’est un guide fait à un moment t avec des pratiques de radios associatives. J’espère qu’il fera des émules, et qu’il y aura une version 2 avec encore plus de participants.

8. Quelles sont les compétences clés que vous cherchez à développer chez vos participants ?

Les compétences clés incluent la compréhension des médias, la communication efficace, la créativité dans la production de contenu, et surtout, la confiance en soi et la capacité à s’exprimer. La radio avait développé un concept quand je suis arrivé, c’était : Donner la parole aux jeunes, s’ouvrir sur les cultures, valoriser les compétences des jeunes et leur estime personnelle, apprendre à vivre ensemble et éduquer les jeunes aux médias. On l’a fait évoluer, mais ça reste une approche qu’on essaye de mettre en œuvre. Et quand on relit bien les choses, on se dit que c’est vraiment d’actualité et tellement nécessaire.

9. Quels défis rencontrez-vous fréquemment dans votre travail et comment les surmontez-vous ?

Les défis incluent souvent l’hétérogénéité des groupes en termes de compétences et d’intérêts. Je les surmonte en adaptant constamment mon approche pédagogique pour répondre aux besoins individuels. Dans les ateliers on a souvent des constructions intellectuelles qui viennent de l’environnement, c’est difficile de casser ça. Pour les formations, on a quelques fois des animateurs ou animatrices ou des gens qui viennent de la médiation qui ont du mal à avoir confiance dans leur pratique car ils pensent que seuls les journalistes peuvent faire de l’EMI. Ce n’est pas notre vision des choses.

10. Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite se lancer dans l’éducation aux médias et à l’information. Ou un mot pour conclure.

Soyez curieux, pratiquez constamment, et ne craignez pas de sortir de votre zone de confort. Suivez une formation comme la nôtre pour la partie médias et animation d’ateliers. Il existe aussi des formations sur les postures, sur la sécurité avec les publics. Mais c’est passionnant. J’ai un mot pour conclure, un mot pour celles et ceux qui décident de nos politiques publiques. Choisissez l’EMI comme grande cause, investissez dans le futur. Comme un biais important d’éducation se fait par les médias ou les réseaux sociaux, et que l’école est défaillante, ou les familles débordées, Éduquer aux médias c’est créer des citoyens de demain qui prendront conscience des actions à mettre en œuvre pour le climat par exemple, pour la diversité dans les médias, pour l’égalité entre les femmes et les hommes… à La Skol nous sommes persuadés que les solutions viendront des jeunes.